Cantines bio: enjeux et freins

Cantine bioLes cantines bio fleurissent depuis quelques années, et tout le monde est demandeur: Etat et collectivités locales, élèves et parents d’élèves, producteurs, chambres d’agriculture… Mais même si les projets régionaux se multiplient, les chiffres avancés -10 millions de repas incluant au moins un produit bio en 2007, soit seulement 0,2% du total du marché de la restauration collective- sont mitigés. Ils laissent mesurer le chemin qui reste à parcourir pour arriver aux niveaux prévus par le Grenelle de l’Environnement, soit 20% d’ingrédients bio dans la restauration collective publique (administrations, hôpitaux, prisons, universités) d’ici 2012. Plusieurs freins existent, et le prix du bio n’est pas le seul en cause.


Des cantines bio un peu partout en France

Depuis les premiers repas bio servis en collectivité en 1992, dans le Gard, les initiatives se multiplient: crèches, écoles, lycées, universités, restaurants d’entreprises… Généralement soutenues par le département ou la région, qui peuvent prendre en charge tout ou partie du surcoût, ces mises en place concrètes montrent bien que le bio à la cantine, c’est possible!

A Romainville (93), par exemple, un lycée a commencé par le pain bio, il y a un peu plus de 3 ans: aujourd’hui, ce sont 50% des achats qui sont bio. Le Ministère de l’écologie, de l’énergie et du développement durable s’approvisionne en bio à hauteur de 15% des achats. Le CROUS d’Aix en Provence a mis en place des « jeudis bio » pour ses étudiants; en Alsace, la filière bio a créé Solibio, une plateforme de conditionnement et de logistique pour répondre aux nouveaux marchés… Les exemples sont nombreux, et ils tendent à montrer que la question du coût (seulement 6% d’écart de prix entre un repas bio servi et l’équivalent non bio) n’est pas le seul frein pour passer au bio en collectivités.


Manque d’organisation des filières bio et allègement nécessaire des contraintes réglementaires

Hormis le prix des denrées, les principaux problèmes restant à résoudre sont la pénurie de produits, l’irrégularité des productions, l’atomisation de l’offre, la désorganisation de la filière (collecte des produits, conditionnement, stockage, redistribution…), le manque de formation des intervenants (intendants, préparateurs…), les contraintes imposées par le Code des Marchés Publics, les exigences des cahiers des charges des collectivités… et peut-être aussi les a priori encore solidement ancrés dans les esprits!


Passer au bio à la cantine, oui, mais de façon très progressive

Des menus 100% bio, tous les jours, du jour au lendemain, c’est malheureusement utopique. Le bio s’installe à la cantine de façon très progressive. Les menus commencent d’abord par introduire quelques produits bio (le plus souvent le pain, la viande, les fruits et légumes, ou les produits laitiers), afin de rôder les processus d’approvisionnement et de se donenr le temps de repenser les coûts en douceur. Puis la proportion de produits bio s’amplifie, dès que de nouveaux fournisseurs sont trouvés, souvent grâce à des structures « conseil » (associations de producteurs, organismes publics, relais régionaux…).
Un cheminement parfois long, qui demande une bonne dose de motivation et quelques concessions de la part des différents acteurs (notamment les gestionnaires et les chefs de cuisine), mais qui permet aux enfants -et aux adultes- de redécouvrir la cantine, avec, dans l’assiette, des produits sains aux saveurs authentiques.


Au-delà du contenu de l’assiette, pourquoi privilégier le bio en restauration collective?

Introduire des repas bio en restauration collective (cantines scolaires, restaurants d’entreprise, fonction publique) représente plusieurs enjeux:

  • Fournir des débouchés durables et stables aux filières bio;
  • Aider l’agriculture bio, les filières de transformation des produits et la distribution bio à se structurer et à se développer (le marché est énorme);
  • Sensibiliser les consommateurs, notamment les enfants, et leur faire découvrir une nouvelle alimentation;
  • Privilégier des modes de culture respectueux des sols et de l’environnement;
  • Favoriser les approvisionnements en produits locaux et limiter les transports;
  • Et bien sûr, agir pour la santé (plus de fruits et légumes, moins de viande mais plus de protéines végétales, plus de nutriments essentiels, moins de produits transformés et… moins de polluants dans l’assiette!).


Augmenter la production française est indispensable pour généraliser le bio dans les cantines

Cependant, la production bio française étant encore beaucoup trop faible (70% de produits bio sont importés), avant de songer à généraliser le bio en restauration collective, il est indispensable d’encourager les agriculteurs à s’y mettre. Car si les produits bio sont chers aujourd’hui, c’est bien parce qu’ils sont encore trop rares: sans accroissement de la production, une brutale hausse de la demande de la part de la restauration collective ne ferait que creuser encore cette différence de prix entre bio et conventionnel… et le bio deviendrait inaccessible pour les cantines, mais aussi pour bon nombre de particuliers!

Encourager le bio à la cantine, c’est une excellente chose, mais accompagner les filières pour leur permettre de satisfaire une demande toujours croissante, c’est une nécessité que le gouvernement, à en croire les engagements du Grenelle de l’Environnement, semble avoir comprise. Reste à savoir si les déclarations seront suivies de mesures concrètes dans les années qui viennent.

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